(le PDF original de la lettre en anglais envoyée à Mme Vestager peut se trouver ici https://www.mlex.com/Attachments/2019-11-28_K683N30599NE42H7/GShopping%20letter%20to%20Vestager.pdf – Attention la traduction en français est faites par un amateur, votre dévoué (FL).)

Mme Margrethe Vestager
Commissaire à la Compétition
Commission Européenne
Rue de la Loi
B – 1049 Brussels
Le 28 Novembre 2019
Les abus continus de dominance de Google font du mal aux consommateurs et aux entreprises du digital sur toute l’Europe. Les services de comparaison des prix et d’aide à l’achat appellent à des actions vigoureuses contre Google pour non-conformité avec la décision de la commission européenne dans le cas « Google Search (Shopping)« .
Madame la Commissaire Vestager,
Les soussignés fondateurs ou dirigeants de 41 services de comparaison de prix et d’aide à l’achat (“CSSs”) européens qui opèrent dans 21 États membres vous félicitent pour votre nomination au titre de Vice-présidente exécutive en charge du Digital et de la concurrence.
En tant qu’exploitants de petites et moyennes entreprises en Europe, nous employons des milliers de talents spécialisés dans le digital et nous sommes tous des participants actifs à la fondation d’une économie digitale Européenne.
Nous revenons vers vous car les entreprises comme les nôtres sont mis en danger par Google, qui évite habilement la loi et les décisions prises par les autorités comme vous-même.
L’abus de dominance continuel de Google fait du mal aux consommateurs et met en danger des centaines d’entreprise sur toute l’Europe.
En particulier, les soussignés fondateurs et dirigeants représentant les services leaders de la comparaison des prix et d’aide à l’achat en Europe, voudraient vous encourager à tout mettre en œuvre pour que votre décision décisive sur le cas Google Search (Shopping) soit enfin appliquée et que Google arrête de se favoriser.
Même si des signataires ont contribué depuis longtemps à l’enquête, la plupart se font entendre pour la première fois, frustrés par les mesures prises par Google qui contournent votre décision dans l’affaire « Google Search (Shopping) ».
Les soussignés veulent souligner que 10 ans après les premières plaintes et 2 ans après la décision, la concurrence n’est toujours pas rétablie sur le marché de la comparaison des prix et des produits. Le mécanisme implanté par Google pour être conforme (le mécanisme de conformité) ne donne pas aux comparateurs (« CSS ») un traitement égal dans les pages de résultats du moteur de recherche ( » SERPs »). Google se réserve toujours le droit d’avoir son propre CSS directement au-dessus de ses SERPs, les « Shopping Units ». Les comparateurs concurrents ne peuvent que proposer une offre individuelle dans le « on-SERP-CSS » de Google sans que leur métier de vrai comparateur de prix n’en bénéficie.
Même en participant au mécanisme de conformité, les soussignés Comparateurs n’ont pas vu d’augmentation du trafic vers leur site web. Au contraire, le trafic global baisse toujours plus, car le «on-SERP-CSS » de Google fait office de comparateur et remplace la demande pour les vrais comparateurs.
La conséquence est que de plus en plus de comparateurs ont dû quitter ou vont quitter le marché, forcés par Google. Dans votre discours au « Websummit » du 7 Novembre 2019, vous étiez tout à fait correcte en observant que “ On peut voir un tas de concurrents dans la Shopping Box. On peut voir plus de clics vers les marchands. Mais on ne voit toujours pas plus de trafic pour les concurrents comparateurs. »(1)
Les soussignés pensent que la résolution de ce cas doit être une priorité de votre mandat. Accepter l’actuel mécanisme de conformité entrainerait la fin de la concurrence sur ce marché. De plus, cela donnerait le mauvais exemple pour tous les autre secteurs où Google se favorise et met à mal la concurrence.
- Les Shopping Units de Google font office en elles-mêmes de comparateur au moins depuis la mise en place du mécanisme de conformité – Shopping Units que Google favorisent clairement dans ses SERPs. La décision Shopping devrait empêcher normalement Google de favoriser « son propre comparateur dans ses pages de résultats ( SERPs) » (2) . Mais Google fait exactement cela, avec toujours plus d’images de produit, toujours plus de prix et d’informations, avec recherche intégrée, les Shopping Units de Google se substituent aux comparateurs pour le consommateur. En conséquence, les Shopping Units de Google ont tout d’un Comparateur comme le définie la décision Shopping(3). C’est pourquoi dire que Google Shopping Europe est traité de la même façon que ces concurrents ne veut en fait rien dire. Cet argument ne sert qu’à masquer le fait que Google propose toujours un comparateur par l’intermédiaire de ces Shopping Units directement dans ces « SERPs ». Comme Google montre plus favorablement ses Shopping Units que ses concurrents dans ces « SERPs », l’abus prouvé dans la décision Shopping de la Commission n’a jamais vraiment cessé.
- Moins de 5% de tous utilisateurs qui cliquent sur les liens de la Shopping Unit arrivent sur un site comparateur concurrent. Cela implique que Google capte 95% de la demande de comparaison. Dans des déclarations passées, la Commission pensait que le mécanisme de conformité augmentait le trafic vers les concurrents. Elle était arrivée à cette conclusion en voyant à l’été 2019 que 75% des Shopping Unit incluaient au moins une offre d’un rival Comparateur et que 40% des clics sur les produits allaient aux concurrents de Google »(4). Pourtant, comme semble l’avoir réalisé entre temps la Commission, ces statistiques sont hautement trompeuses : les données réelles montrent que moins de 5% de tous les clics dans les Shopping Unit dirige l’utilisateur vers un comparateur concurrent. Les clics vers les marchands, en effet, n’augmentent pas le trafic vers les concurrents mais proviennent des consommateurs utilisant le comparateur « on SERP CSS » de Google. Ces clics sont pour Google seulement. Quand ils participent au mécanisme de conformité, les comparateurs concurrents ne sont plus que des intermédiaires pour faire payer aux marchands un emplacement dans les Shopping Unit. La décision « Shopping » montre bien que c’est un business différent(5). C’est pourquoi le nombre mis en avant de 600 compagnies (6) qui participeraient au mécanisme de conformité ne veut rien dire quant à l’impact réel qu’a le mécanisme sur le marché des comparateurs. Comme le montre une étude indépendante publié le 26 Novembre 2019 (7) : « Aujourd’hui 48,9% de toutes les publicités pour produits montrées dans les Shopping Unit ne proviennent pas de Google mais de compagnies externes. En affinant, on voit que la majorité de ces publicités proviennent d’agences de publicité. 35,1 % proviennent d’agences de pub et seulement 13,8% proviennent de Comparateurs concurrents qu’on peut considérer rivaux de Google Shopping »(8). Les restant 51,1 % des publicités sont de Google Shopping Europe. Nous représentons ces 13,8% de vrai comparateurs.
- La dernière introduction par Google dans certains pays qui permet parfois de changer l’affichage par un nouveau bouton en un affichage plus typique « Comparaison » n’apporte en réalité rien de mieux. La commission a parfois fait l’éloge de ce système qui permet parfois de changer l’affichage Publicité (qui mène directement vers le marchand) en un affichage «Comparaison» (qui mène vers un comparateur concurrent). Nous n’avons pas vue d’amélioration, et vue le positionnement inférieur et le design de ces publicités «Comparaison», il n’est pas surprenant que nous n’ayons observé aucun effet positif dans les pays où cette introduction a sporadiquement été prise en place. De toute façon, cette introduction n’apporte rien d’intéressant à l’utilisateur et est simplement sans intérêt pour le consommateur et pour nous les comparateurs.
Les Consommateurs payent le prix de la non-conformité de Google à la décision de la commission
Depuis la décision Shopping, des concurrents comparateurs ont dû quitter le marché car ils ne peuvent plus être trouvés par les utilisateurs de Google dans les SERPs. Et ce ne sont pas seulement les concurrents qui souffrent de la non-conformité de Google. Une étude par Grant Thornton (9) montre qu’au final, c’est le consommateur qui en paye le prix – dans certains marchés, le prix des produits montrés dans les Shopping Units de Google sont 30% supérieurs aux prix trouvés sur les site web des comparateurs concurrents. En moyenne, un utilisateur passé par les Shopping Units payent 13.7% de plus.
Accepter le mécanisme de conformité va réduire la concurrence et nuire aux consommateurs dans beaucoup de secteurs.
Accepter le mécanisme de conformité comme un remède suffisant à l’infraction aurait des conséquences dévastatrices. La Commission permettrait ainsi à Google de consolider sa position dominante conquise en abusant de sa dominance depuis plus de dix ans maintenant. Pour couronner le tout, en vendant le mécanisme de conformité comme un remède, Google pourra toujours par la suite rejeter la responsabilité de l’augmentation des prix pour les consommateurs et pour la publicité sur la Commission (10). Si Google peut détourner un remède en un système lui faisant faire toujours plus de bénéfices, à son seul profit, cela envoi un très mauvais et inquiétant signal pour l’avenir.
Pour ces raisons, nous demandons à la Commission de s’attaquer désormais formellement à la non-conformité de Google. Google a disposé de deux ans pour présenter un mécanisme de conformité réaliste : les données montrent qu’il ne l’a pas fait. Il appartient maintenant à la Commission d’appliquer sa décision et de mettre enfin fin aux abus. Si vous avez besoin de plus de donnée, nous serions heureux de vous les fournir le plus vite possible. Elles montreront que le trafic vers les vrais comparateurs (comme défini dans la décision Shopping) continu de décliner avec aucune amélioration en vue.
Sincèrement votre
(par ordre alphabétique) Vous pouvez voir la liste des 41 signataires sur la lettre originale en anglais ici : https://www.mlex.com/Attachments/2019-11-28_K683N30599NE42H7/GShopping%20letter%20to%20Vestager.pdf )

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(1) Press Conference by Commissioner Vestager on “The transformative power of technology and digitization”, #WebSummit Lisbon, https://www.youtube.com/watch?v=QGvj12gd3UU, at 09:50-10:10.
(2) Shopping Decision,para.699.
(3) Shopping Decision,para.191
(4) Statement by Commissioner Vestager on Commission decision to fine Google € 1.49 billion for abusive practices in online advertising, Brussels, 20 March 2019, http://europa.eu/rapid/press-release_STATEMENT-19-1774_en.htm.
(5) Shopping Decision, para. 439 “competing [CSSs] are not eligible to participate in Google Shopping, unless they change their business model by […] acting as intermediaries for placing merchants’ paid product results in the Shopping Unit”.
(6) Oliver Bethell, Director, Google EMEA Competition, Advanced Competition Law Conference, Brussels, 25 November 2019.
(7) Searchmetrics Study: Google Shopping 2019, available at https://www.searchmetrics.com/knowledge-base/shopping-study-2019/
(8) Searchmetrics, Press Release, 26 November 2019, New study: Competition is increasing in Google Shopping, but will this satisfy EU regulators?, https://www.searchmetrics.com/news-and-events/google-shopping-study-2019/ (emphasise taken from the original)..
(9) Grant Thornton, Google Shopping-EU-Benchmark Study, 13 May 2019, available at https://www.idealo.de/unternehmen/wpcontent/uploads/sites/33/2019/05/Google-Shopping-EU-benchmark-study_13.5.2019.pdf.
(10) See, to this effect, Oliver Bethell, Director, Google EMEA Competition, Protecting Consumers’ Freedom in the Digital Era, BEUC workshop, 2 October 2019 “You look at a theory such as favoring. We have a very good idea of what that means in Shopping. We have thought that out, we have talked to regulators about it a lot. We are very clear about the understanding of the conceptual framework, the evidence that will be brought into that discussion. So too in other areas of vertical search”.